10 juin 2021

 

Coup de projecteur sur l’interview croisée de Sylvie Lemmet, Présidente du Comité Finance, Risques et Impact, Jérôme Brunel, Président du Comité Conformité et Contrôle interne, et Bernard Lepot, Président du Comité d’Investissement, à découvrir dans le Rapport intégré 2020 de la Fondation.

En vous remémorant le moment de la survenance de la crise, pouvez-vous nous dire quelle fut à ce moment-là votre perception ?

Bernard Lepot : Dès le mois de mars nous avons tous compris que nous étions en « terra incognita » pour une durée indéterminée avec des conséquences systémiques peu lisibles. Tous les continents étaient touchés dont l’Afrique et l’Asie où nous avons l’essentiel de nos activités. Le risque de fortes difficultés de nos partenaires étaient probables avec possiblement d’importantes provisions pour la Fondation. Malgré cette absence de visibilité, il fallait, pour le Conseil, définir rapidement la posture de la Fondation que nous résumons ainsi : soutien à nos partenaires existants et concertation avec les autres prêteurs internationaux.

Sylvie Lemmet : En mars dernier, nous étions dans l’inconnu total. Avec le sentiment que la crise allait frapper fortement les pays en développement et que nous allions être confrontés à des faillites potentielles et des pertes pour la Fondation. Nous étions inquiets pour nos partenaires.

Jérôme Brunel : Je craignais que l’impact de la pandémie, dont je pensais qu’elle allait affecter plus fortement les pays en voie de développement ou émergents moins développés –ce qui n’a d’ailleurs pas été confirmé–, fragiliserait la solidité des contreparties de la Fondation entraînant un montant substantiel de provisions, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent grâce à la résilience des organisations soutenues ainsi qu’à la coordination et les actions communes des différents acteurs du secteur de la finance inclusive.

Quel a été le rôle du Comité que vous présidez dans ce contexte ?

J.B. : Le Comité de Conformité et de Contrôle interne a joué pleinement son rôle en adaptant le dispositif de contrôle interne à la montée des risques Covid-19, en organisant une formation sur les méthodes de restructuration de dettes, en adaptant la politique de provisionnement et en approfondissant la collecte des informations sur les clients finaux de nos contreparties. Mais à vrai dire, c’est surtout le Comité des Finances, Risques et Impacts qui avait le rôle premier dans la mobilisation de la gouvernance de la Fondation pour faire face aux conséquences de la pandémie.

S.L. : Le Comité Finance, Risque et Impact (FRI) comprend déjà le Président du Comité de Conformité et de Contrôle interne parmi ses membres. L’an dernier, nous avons immédiatement senti le besoin de faire le lien avec le Comité d’Investissement et son Président a aussi siégé dans le Comité FRI. L’évolution de la gouvernance avec ce comité ad hoc s’est révélée extrêmement positive. Cela nous a permis de construire ensemble et avec le Comité de Direction de la Fondation une bonne compréhension de la situation globale (l’impact sur le portefeuille, la liquidité et la marge) et une doctrine d’intervention, que nous avons faite évoluer au fur et à mesure de la crise. L’objectif : fournir l’oxygène nécessaire à nos partenaires tout en « monitorant » le risque de défaut de remboursement.

B.L. : Une fois la feuille de route établie, le Comité d’Investissement a continué à se réunir tous les mois mais en visio-conférence avec une activité de nouveaux dossiers bien sûr réduite mais avec un suivi rapproché des reports d’échéance accordés aux institutions de microfinance qui en faisaient la demande et plus généralement, un suivi du risque renforcé. Le Conseil avait également décidé la création d’une instance ad hoc réunissant les 3 Présidents des Comités spécialisés pour examiner et approfondir les adaptations éventuelles de la stratégie de la Fondation. Cette structure s’est réunie plusieurs fois permettant les échanges avec les équipes et l’éclairage du Conseil avant décisions.

Un an après, quels sont les enseignements que vous tirez de cette expérience et quelles perspectives voyez-vous pour la Fondation en 2021 ?

S.L. : Un an après, je suis avant tout rassurée par la qualité des femmes et des hommes qui forment l’exécutif de la Fondation et qui ont su réagir avec beaucoup de souplesse, de professionnalisme et d’engagement dans une situation inédite. Nous avons su maîtriser les risques financiers sans abandonner nos partenaires en difficulté. Nous avons pu tester la résilience des organisations soutenues, ce qui rassure à la fois sur leur qualité et sur la résistance du secteur de la microfinance face aux chocs. C’est d’ailleurs un point qu’il faudra creuser pour mieux comprendre les mécanismes qui se sont mis en oeuvre localement et l’impact social réel derrière la bonne performance financière. Pour 2021, nous espérons tous le retour d’une situation moins chaotique et la reprise des activités. Il faudra tirer les leçons des instructions à distance et jongler avec une activité qui semble reprendre mais des déplacements qui restent limités. La pandémie n’est pas encore derrière nous, mais j’espère qu’elle restera sous contrôle dans nos pays d’intervention.

J.B. : La crise sanitaire a montré d’abord, la solidité des engagements pris par la Fondation, c’est-à-dire le choix judicieux de ses contreparties. Ensuite, la qualité de la réaction de l’équipe –et de son Délégué général– pour s’adapter à ce contexte inédit, aidée par la mobilisation de son Conseil et de ses Comités spécialisés. Enfin, l’engagement de la Fondation à continuer malgré cet environnement « hostile » l’activité de prêteur et à soutenir les institutions de microfinance par une initiative internationale pour harmoniser les politiques des autres prêteurs et par un travail précis de dialogue avec chacun des emprunteurs.

B.L. : Un an après, il convient de souligner la remarquable mobilisation et adaptation des équipes de la Fondation avec une grande collaboration entre les différentes fonctions. A ce jour, il faut noter aussi la grande résilience de notre portefeuille, peut-être même au-delà de ce que nous pensions. Une bonne information et implication du Conseil lui a permis d’exprimer sans réserve son soutien et sa solidarité à la stratégie et aux actions de la Fondation. Pour 2021 les choses sont toujours très incertaines avec peut-être une meilleure visibilité au 4e trimestre, mais là encore rien n’est sûr. Espérons que 2021 sera une année de transition permettant de reprendre nos activités de développement en 2022.

Téléchargez le Rapport Intégré 2020 ici.